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Exposition de Photographies de Serge Trib « Femmes de la Carrière » du 17 au 25 octobre 2015 à Galerie de l’Oratoire de Villeneuve les Avignon.

Il existe, non loin du centre de Ouagadougou, sur la route de Bobo-Dioulasso , derrière le camp militaire de Lamizana, au milieu d’un quartier construit et habité, une carrière « illégale » mais tolérée, d’exploitation de granit pour la construction des routes et des habitations. Un lieu un peu caché, presque secret dans lequel on ne pénètre pas facilement: la carrière de Pissy.

Actuellement, près de 3000 personnes y travaillent, avec une majorité de femmes (1700 environ). La carrière est un gouffre qui fait environ 300 mètres de long, 100 mètres de large et plus d’une vingtaine de mètres de profondeur.
Toute l’année, un peuple industrieux s’y active et en extrait le granit: quelques enfants et adolescents (assez rares car scolarisés par des ONG), des hommes, préposés aux travaux de force (extraction principalement), des femmes de tout age (des jeunes filles aux grands mères) qui cassent les cailloux et les transforment en différents graviers (des grossiers aux plus fins) à l’aide de pilons solides, des cardans d’automobile, près de 10 heures par jour.

Pour éclater la roche granitique, on brûle des pneus de camion recouverts de terre. Durant 3 à 4 jours, les pneus se consument et la chaleur provoque des fissures de surface dans la roche. Une fois le monticule refroidi, on enlève la terre, on récupère la ferraille des pneus (qui sera vendue ultérieurement) et on attaque la roche avec des barres de fer. Les blocs extraits seront cassés à la masse, réduits en morceaux que les femmes transformeront en gravier.
Pour se protéger du soleil , elles et leurs enfants, les femmes construisent de sommaires petits cabanons individuels en bambou recouverts de quelques vieux tissus.
Le gravier sera porté du fond de la carrière jusqu’au terrain supérieur par des jeunes femmes solides dans des bassines qui semblent être l’unité de mesure et qui pèsent entre 15 et 20 kilos. Sur le sol accessible aux véhicules (où travaillent aussi des « vieilles »  qui ne peuvent descendre au fond), les entrepreneurs viennent avec leur camionnette ou leur charrette et achètent les tas de gravier constitués. Aucun « patron » dirige l’ensemble de la carrière mais on y trouve quelques milliers d’  «entreprises individuelles»! Aucune organisation visible mais toute l’exploitation semble rodée, chacun fait partie d’un groupe (familial ou autre) et travaille au sein de ce groupe.

J’ai pu y pénétrer deux fois, une fois franchi les filtrages de l’entrée, car n’entre pas qui veut… et encore moins pour photographier! Sur les pas d’une amie bénévole, Dalila, qui soigne gratuitement 2 fois par semaine les enfants, ados, femmes et hommes de la carrière ( problèmes oculaires, musculaires, blessures diverses, troubles respiratoires…).
Dans cette antichambre de l’enfer, dans ce bagne volontaire, j’ai rencontré des femmes qui souriaient à mon passage, dans la poussière, le bruit, les fumées et les odeurs de caoutchouc brûlé… Seuls les enfants étaient étonnés de voir là un « nasara » dans leur monde, un « blanc » qui tentait de tenir à distance l’émotion pour se concentrer sur la prise de vue des images à rapporter de cet univers à la limite du supportable, de l‘inhumain…

J’ai voulu témoigner par mes images de cette dignité des uns et des autres, de cette beauté préservée des femmes…J’ai voulu rendre hommage à ces « Femmes de la Carrière » , ces casseuses de cailloux, ces porteuses, ces grand’mères, ces fillettes… fortes, dignes et belles qui, sans le savoir, nous donne une belle leçon de courage, de partage, de vie… dans la carrière de Pissy, à Ouagadougou, au Burkina Faso, le « Pays des Hommes Intègres »!

L’exposition comportera 19 photographies dont 9 diptyques en format 40 cm X 60 cm, couleurs et noir et blanc.

Galerie de l’Oratoire
place de l’Oratoire
30400 Villeneuve les Avignon